
Que
règne la paix et l'amour parmi tous les êtres
de l'univers. OM Shanti, Shanti,
Shanti.
ENTRETIEN
AVEC
DAVID
GODMAN
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AVID : Papaji,
nous essayons de faire un film sur vos
enseignements. Comment pouvons-nous faire un film
alors que vous dites n'avoir pas d'enseignement
?
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Papaji
: Délivrer un enseignement, c'est
prêcher. Un véritable enseignant n'a
pas d'enseignement, pas de méthode, pas de
chemin. Pour connaître votre propre Soi, vous
n'avez pas besoin d'enseignement. Ce que vous
êtes véritablement, vous êtes
toujours Cela même. Personne ne va vous
donner un enseignement. Vous devez réaliser
qui vous êtes, ici-maintenant, en cet
instant.
David : Considérez-vous comme un
enseignement le fait d'indiquer aux gens la
direction vers laquelle ils devraient regarder
?
Papaji : Les gens ne devraient regarder dans
aucune direction. [rires] Regarder dans une
direction particulière signifie rester
fixé à un objet, à l'objet
vers lequel vous dirigez votre attention. C'est
ainsi que les gens se perdent. Mais s'ils se
débarrassent de toutes les directions, s'ils
n'ont aucun concept de direction dans leur mental,
ils connaissent alors ce qu'ils sont réelle
ment. Ils savent qu'ils sont Cela même,
qu'ils l'ont toujours été et qu'ils
le seront toujours.
David : Vous considérez-vous comme un
Guru, Papaji ?
Papaji : Non, pas du tout ! [rires]
Je ne déclare jamais : "Je suis un
Guru."
David : Qu'en est-il de tous ces gens qui
pensent être vos adeptes, vos disciples ?
Sont-ils vos adeptes ?
Papaji : Quand il n'y a pas de Guru, il
n'est pas question d'adepte. Je souhaite la
bienvenue à tous ceux qui viennent me voir,
qui que ce soit. S'ils ne viennent pas, je leur
souhaite quand même bonne chance. Et quand
ils me quittent je dis, "Adieu, vivez heureux
où que vous soyez."
David : Vous encouragez chaque personne
venant vous voir à chercher son propre Soi.
Pourquoi faites-vous ceci ? Quelle est votre
motivation ?
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Papaji
: Mon propre bonheur. Ces gens dorment. Ils
souffrent tous alors que le trésor est en
eux. Tous les êtres humains de ce monde
souffrent parce qu'ils essaient de trouver la paix
et le bonheur dans les objets. Ils examinent et
éprouvent les objets un par un, avec pour
seul résultat la douleur et la souffrance.
Il n'existe pas d'objet dans le mental, pas de
personne, pas de chose, pas de concept qui puisse
vous restituer le bonheur et la paix de l'esprit.
Par conséquent, je leur donne seulement
cette information : "Ne regardez pas ici,
là-bas, où que ce soit. La paix est
au-dedans de vous et dans le Cur de tous les
êtres. Donc restez tranquille, ne regardez en
aucun endroit, ne permettez pas à votre
mental de se maintenir où que ce soit, et
vous verrez que Cela est la paix, le bonheur
même. Voilà la vérité
fondamentale. Chaque être au monde est le
bonheur même."
David : Il me semble que la plupart des gens
qui viennent vous voir pensent que vous transmettez
plus que de simples informations. Je pense qu'ils
sentent en votre présence un pouvoir, une
Grâce qui leur permet de découvrir ce
que vous désignez. Avez-vous des remarques
à faire à ce sujet ?
Papaji : Certainement. Je désigne
leur propre Soi qui est la fontaine de la
Grâce, de la beauté. L'amour et la
paix y prennent également naissance. Je leur
signale seulement : "Regardez en vous-même
pendant une seconde. Vous n'avez pas à
chercher, vous n'avez pas à trouver.
Regardez simplement en vous-même et vous
verrez que vous êtes la paix même." Je
ne fais que souligner ceci. Les gens sont endormis
et parce qu'ils rêvent, il vaut mieux les
éveiller. Ces rêves ne sont que des
projections mentales, mais comme les gens les
prennent pour réelles, elles sont cause de
beaucoup de souffrances. Si vous voyez en
rêve un tigre, vous êtes
effrayé. Il en est de même si vous
rêvez que vous êtes attaqué par
un voleur.
Stoppez toutes les projections mentales. Voyez que
le rêve est seulement un rêve. Voyez
qu'il n'est pas réel. Quoi que vous voyez,
ce n'est qu'un rêve. Partout où il y a
un objet, quelqu'un qui voit et ce qui est vu,
c'est un rêve. S'il y a des objets et un
sujet qui les voit, il y a rêve. Mais si,
d'une façon ou d'une autre, vous vous
débarrassez du sujet, des objets et de la
relation entre eux, que reste-t-il ?
David : Quand vous regardez les gens qui
viennent et qui vous disent : "Papaji, je souffre",
ressentez-vous de la compassion pour eux, et quand
ils s'éveillent, vous réjouissez-vous
?
Papaji : Je ressens effectivement de la
compassion. Comment pourrait-il en être
autrement pour moi ? J'ai de la compassion pour
tous les êtres qui souffrent et qui
rêvent. Je leur dis simplement :
"Éveillez-vous, mes chers amis. Mes chers
enfants, éveillez-vous. Il n'existe pas de
souffrance du tout. Il n'y a qu'une projection de
votre mental. Ce n'est pas réel. Vous
êtes en train de rêver.
Éveillez-vous du rêve et toute la
souffrance cessera."
David : J'aimerais que vous nous racontiez
l'histoire du professeur japonais qui n'avait qu'un
poumon et qui ne pouvait s'empêcher de rire.
Je pense que c'est une très bonne histoire
en rapport avec votre enseignement. Pouvez-vous
nous la raconter en entier ?
Papaji : [Papaji rit] Quand il
arriva dans ma maison, j'étais à
l'étage en train d'y donner un satsang. Il
demanda aux personnes en bas si je pouvais
descendre, car son médecin lui avait
recommandé de ne pas monter d'escalier.
On lui répondit : "Papaji est très
occupé en ce moment. Il donne un satsang en
haut. Si vous ne pouvez pas attendre, il vous faut
monter pour le voir."
Cet homme désirait beaucoup me voir, aussi
il décida de monter l'escalier plutôt
que d'attendre que j'aie fini. Les personnes en bas
l'aidèrent mais, malgré cela, il
monta très lentement et avec de grandes
difficultés.
Quand il arriva dans la pièce nous
étions tous en train de rire, y compris
moi-même. Pendant tout le temps qu'il resta
là, il n'y eut pas d'enseignement verbal, ce
n'était que rires continuels. Bien qu'il ne
connût pas la raison de nos rires, il se
joignit à nous. Puis, comme c'était
l'heure du déjeuner, nous descendîmes
tous manger.
Pendant le repas, il déclara : "À la
suite d'une opération je n'ai plus qu'un
poumon. Mon médecin m'a recommandé de
ne pas monter d'escalier et de ne pas rire, car ces
activités suscitent trop d'efforts pour mon
poumon. Si je ris ou si je monte des escaliers, je
dois prendre un médicament pour m'aider
à m'en remettre. Mais ici je ne ressens
aucun besoin de prendre ce médicament. En
fait, je me sens comme si mon poumon manquant avait
été remplacé."
Puis il se mit à rire de nouveau. Pendant
tout le temps qu'il est resté avec moi, il
n'a pas posé une seule question. Il n'a fait
que rire. Cela ne le fatigua pas et il n'eut jamais
besoin de prendre son médicament.
Plus tard, alors qu'il était de retour au
Japon, il envoya un de ses étudiants me
voir. Cet étudiant me dit qu'on demanda
à son professeur, après son retour au
Japon : "Que rapportez-vous de Lucknow ? Quel est
l'enseignement de Poonjaji ?"
Sa seule réponse fut de rire et de rire
encore.
Quand son rire s'arrêta enfin, on lui
répéta la question : "Quel est
l'enseignement de Poonjaji ?" Il répondit :
"Rire, rire et danser."
Quand quelqu'un rit, il n'a pas de mental, pas de
pensée, pas de problème, pas de
souffrance.
David : Donc, tant qu'il rit, il n'y a pas
de mental.
Papaji : Pas de mental. Essayez !
[rires] Ceux qui ne rient pas ont un
mental. Ils semblent très sérieux et
ils ont beaucoup de problèmes. Ils ont un
mental, car pour avoir un problème, une
souffrance quelconque, il vous faut un mental.
C'est le mental qui souffre, voyez-vous. Donc, il
vous suffit d'en rire. Riez au moindre
problème ! Si vous riez, il s'en ira, il
s'enfuira, il s'envolera.
David : Donc le rire répond à
une absence de douleur et de souffrance. Est-ce
bien cela ?
Papaji : Que dites-vous ?
David : Le rire spontané survient
lorsque tous les problèmes mentaux s'en vont
?
Papaji : Bien sûr, bien sûr,
oui, oui. Seul rit, seul danse l'homme qui s'est
débarrassé de tous ses
problèmes. Pour résoudre tous ses
problèmes, il lui suffit de danser, il lui
suffit de rire.
Un saint homme vivait en haut d'une colline.
À minuit, lors d'une nuit de pleine lune, il
se mit à rire, à rire sans fin. Tous
les villageois se réveillèrent, se
demandant ce qui arrivait à ce moine.
Ils montèrent au sommet de la colline et
demandèrent : "Monsieur, que se passe-t-il
?"
Le saint répondit en riant : "Regardez !
Regardez ! Regardez ! Il y a un nuage ! Il y a un
nuage !"
Beaucoup de gens voient des nuages, mais seul en
rit celui qui n'a pas de mental. Tout ce qu'il voit
est pour lui une occasion de rire. Car au moment de
poser son regard il devient la chose même
qu'il regarde. Le nuage est là avec la Lune
derrière. Si vous êtes sans mental,
rien que cette vision peut vous faire rire.
David : Alors, quand vous voyez le monde,
Papaji, cela vous fait rire la plupart du temps.
Pensez-vous que tout cela n'est qu'une vaste
plaisanterie ?
Papaji : [rires] Je plaisante
seulement, qu'y a-t-il d'autre à faire ? Je
n'étudie pas de sutras, je n'ai jamais
étudié de sutras, ni je ne me
réfère à aucun sutra. Je ne
fais que plaisanter. [rires
intenses]
David : Papaji, nous faisons ce film
pour des téléspectateurs
étrangers qui ne savent probablement pas
grand chose sur vous ou sur votre enseignement.
Pouvez-vous leur dire, je vous prie, ce qu'est
exactement l'éveil, en des termes qu'ils
peuvent comprendre ?
Papaji : L'éveil ou illumination
concerne les gens qui n'ont pas trouvé de
satisfaction dans les assouvissements sensoriels.
Il est destiné aux personnes qui en ont
assez des choses, des objets et des plaisirs
qu'elles en retirent. Le désir de
liberté, d'éveil, prend naissance
quand on commence à comprendre que le
bonheur permanent ne peut être trouvé
dans les plaisirs des sens.
Les objets enregistrés par les cinq sens ne
peuvent vous donner de bonheur permanent. Si vous
désirez quelque chose, un objet
enregistré par les sens, un bonheur
naîtra brièvement au moment de
l'assouvissement de votre désir. Mais ce
n'est pas l'objet lui-même qui vous donne le
bonheur, c'est l'assouvisse ment de votre
désir pour cet objet. Quand le désir
est présent, quand on veut encore
réaliser ou obtenir quelque chose, il n'y a
pas de bonheur. Le désir cesse seulement au
moment où il est satisfait. Alors il n'y a
pas de pensée, pas de désir. Si vous
examinez de près votre propre vécu,
vous découvrirez que le bonheur surgit
spontanément seulement lorsqu'il n'y a pas
de pensée et pas de désir et qu'il
disparaît au retour des pensées et des
désirs.
Que peut-on en déduire ? Simplement, en
conclusion, que le bonheur survient lorsque vous
êtes vide de pensée et de désir
et qu'il n'est plus vécu quand les
pensées et les désirs sont là.
Par conséquent, le bonheur réside
dans le vide de la non pensée et non dans la
recherche de plus en plus de choses.
Les objets et les désirs qui s'y attachent
sont transitoires, ils viennent et s'en vont. Tout
ce qui vient et s'en va n'est pas permanent. Si
vous voulez un bonheur permanent vous devez
comprendre que vous ne pouvez jamais l'obtenir par
la poursuite de choses qui viennent et s'en
vont.
Le vide de la non pensée, du non
désir, est permanent. C'est la source du
bonheur permanent, véritable. En fait, c'est
le bonheur même. Lorsque vous comprenez et
acceptez entièrement ceci, le mental ne se
tend plus vers des gratifications
extérieures, parce qu'il comprend que l'acte
même de se tendre provoque l'émergence
du désir et de la souffrance. Lorsque vous
pouvez demeurer dans ce vide, ce bonheur permanent,
sans ressentir le besoin de chercher le bonheur
ailleurs, vous êtes libre des désirs
et de la souffrance. Cette liberté est
l'illumination.
Une fois établi dans cet état, vous
n'aurez plus à vous faire de soucis ou
à poursuivre quoi que ce soit dans ce monde.
Les gens et les choses de ce monde seront toujours
là, mais ils ne vous causeront plus de
problème ou de souffrance, parce que le
désir d'obtenir du plaisir et du bonheur
grâce à eux ne naîtra jamais. Le
vide, le bonheur, ne diminueront jamais même
si vous menez une vie active dans le monde, car les
pensées et les désirs qui
occasionnaient précédemment
misère, souffrance et frustration ne
prendront simplement plus naissance.
Lorsque vous avez un désir de
liberté, lorsque vous commencez à
comprendre que le bonheur permanent ne peut
être gagné par la poursuite des
plaisirs de ce monde, vous devriez vous mettre en
quête d'un être parfait, de quelqu'un
qui s'est établi dans l'état de
bonheur véritable et permanent. Un tel
être, dont le Cur est la perfection
même, peut vous rendre présent au
bonheur et au vide qui résident au-dedans de
vous. Il peut le faire par le pouvoir de sa
pensée, en vous regardant, en vous touchant
ou simplement en restant tranquille. Quiconque
vient en contact avec un tel être profitera
de sa présence. Un tel être parfait
n'a pas le sens de soi, pas le sens d'être
une personne individuelle. Bien que tous ceux qui
viennent à lui ressentent un bienfait en sa
présence, cet être parfait ne pense
jamais qu'il aide quelqu'un parce qu'il sait qu'il
n'y a personne qui soit séparé ou
distinct de lui.
Vous faites tous l'erreur de croire que vous
êtes des personnes séparées,
avec des esprits et des corps
séparés. Cette idée n'est
qu'une pensée. Près d'un être
pleinement réalisé, cette
pensée peut disparaître, laissant
derrière elle une présence à
votre véritable nature. Le vide du non ego,
du bonheur pur dont vous faites l'expérience
en présence d'un être
réalisé est la connaissance directe
de la réalité même.
Je ne conseille jamais à qui que ce soit de
renoncer au monde. Ceci n'est pas le chemin pour
obtenir l'illumination. On l'a essayé
pendant des milliers d'années tant en
Occident qu'en Orient, mais cela n'a pas
donné de bons résultats. Mon conseil
est différent. Je dis simplement : "Restez
tranquille. Demeurez là où vous
êtes. Ne rejetez pas vos activités du
monde. Restez simplement tranquille pendant une
seule seconde et voyez ce qui arrive."
C'est une idée entièrement neuve. Je
ne pense pas qu'elle ait été
émise par qui que ce soit auparavant.
Précédemment, les gens avaient
l'habitude de faire des tapas pendant des
années et des années dans des lieux
retirés, essayant d'atteindre
l'éveil. Même des rois
renonçaient à leurs royaumes,
allaient dans la forêt et vouaient toute leur
énergie à l'obtention de
l'éveil. Mais cela n'a pas marché.
Pourquoi ? Parce que la liberté,
l'illumination, n'est pas une chose qui peut
être "gagnée" ou "acquise". Elle est
déjà ici-maintenant, au-dedans de
vous, elle est votre propre Soi. Vous n'avez pas
à partir ailleurs à sa recherche.
Elle est dissimulée par les idées
fausses que vous avez de vous-même. Vous
pensez : "Ceci est mon corps, ceci est mon mental."
Ces idées sont les obstacles qui vous
séparent de la présence à
votre vraie nature. Si vous pouvez les ôter
de votre mental, vous êtes libre. Vous pouvez
abandonner ces idées n'importe où.
Vous n'avez pas besoin d'aller dans une forêt
pour vous en débarrasser.
David : Les gens en Occident
reçoivent continuellement des conseils de
maîtres spirituels. Tout le monde leur dit :
"Joignez notre groupe et vous serez heureux. Suivez
nos conseils et vous serez heureux." En quoi votre
message est-il différent et pourquoi les
gens devraient-ils le croire?
Papaji : Ils conseillent les gens pour les
détruire. Je leur dis de rejeter ces
enseignants et ces prêcheurs et de venir
à moi. Je serai de bon conseil.
N'écoutez l'avis de personne, y compris le
mien. Jetez un coup d'il en vous-même
et écoutez votre propre voix.
Qu'entendez-vous ? N'écoutez aucun conseil,
ils appartien nent tous au passé. Tout
conseil est venu de quelque chose entendu, lu ou
vécu par celui qui conseille. Donc tous ces
conseils viennent du passé. Vous n'avez
besoin d'aucun conseil pour connaître votre
propre Soi. Par conséquent, n'écoutez
l'avis de personne. Simplement, restez tranquille.
C'est le meilleur conseil. Je dis aux gens :
"Restez tranquille. Ne pensez pas et ne faites
aucun effort pendant une seule seconde."
Voilà mon conseil. Et si vous le suivez,
vous aurez très bien fait, non seulement
pour vous-même, mais pour tout le monde, pour
tous les êtres de la terre.
David : Donc suivre n'importe quel conseil
excepté celui de "rester tranquille" vous
éloigne du Soi, au lieu de vous en
rapprocher.
Papaji : Bien sûr, bien sûr,
c'est obligé, car cela vous ramène au
passé. Je répète : tout
conseil que vous pouvez mentionner est venu de
quelqu'un qui l'a entendu ou lu. Cela ne vient que
du passé. Cela ne peut vous montrer ce que
vous êtes maintenant, juste en ce moment. Ne
croyez en aucun des messages qui vous parviennent.
Ne croyez même pas en l'information que vos
sens vous envoient. Ignorez tout conseil,
transcendez les sens et toute l'informa tion qu'ils
vous donnent. Alors, et seulement alors, vous
saurez qui vous êtes. Vous avez
goûté aux plaisirs des sens pendant
des millions d'années. Maintenant que vous
avez pris une forme humaine, tirez-en le meilleur
parti.
N'écoutez aucun conseil. Les conseilleurs
n'ont pas obtenu de bons résultats. Ils vous
apprennent seulement à vous battre, à
vous disputer avec vos voisins et avec toutes les
personnes qui n'appartiennent pas à votre
église. Et si vous suivez leurs conseils,
d'autres enseignants vous diront alors : "Non, ne
les écoutez pas, suivez mes conseils."
À partir de là, les disputes sont
inévitables.
David : Vous dites, Papaji, qu'un fort
désir de liberté est
nécessaire. D'autres aptitudes sont-elles
requises ?
Papaji : Je ne pense pas que le terme
aptitude soit approprié. Le désir de
liberté surgit spontanément de
l'intérieur. Chez quelques rares personnes,
il prend naissance à l'intérieur et
danse au sein de la liberté même.
Quand un désir naît pour un objet des
sens, vous êtes heureux d'aller à la
rencontre de cet objet. Mais la liberté
n'est ni un objet, ni un sujet. Le désir de
liberté naît dans la source, joue sur
la source et s'apaise dans cette même source.
Quand il est là, il joue avec
lui-même, prenant plaisir pour quelque temps,
avant de s'apaiser. Naissance ou apaisement ne sont
jamais un problème, car il est toujours le
même, qu'il s'élève ou non.
Quand les gens disent : "Le désir de
liberté se lève et se calme", cela
signifie que pour le reste du temps d'autres
désirs se lèvent et retombent. Ainsi,
quand vous dites : "Le désir de
liberté s'est levé en moi", vous
sous-entendez qu'il y a eu un moment pendant lequel
le désir n'était pas là. Dans
mon cas, je n'ai jamais senti se lever le
désir de liberté, car il a toujours
été là. Depuis l'enfance, il
est là.
David : Devons-nous avoir foi en quelque
chose, Papaji ? Devons-nous croire que les paroles
du maître sont exactes ? Devons-nous croire
que nous pouvons atteindre la liberté ?
Devons-nous avoir foi en quelque chose ?
Papaji : Oui, bien sûr, il vous faut
avoir foi, foi en votre propre Soi, foi en "je suis
libre". Si vous voulez avoir foi en quelque chose,
voici la meilleure foi que vous puissiez avoir :
"Je suis déjà libre." Votre croyance
actuelle est : "Je souffre, je suis
aliéné." Pourquoi ne pas changer cela
en la meilleure foi qui soit, en "je suis libre" ?
Quelle différence cela fait-il ?
David : Si l'on a la conviction absolue "je
suis libre", la conviction devient alors
expérience. Est-ce bien ce que vous dites
?
Papaji : Non, pas "expérience". La
liberté n'est pas une expérience. Les
expériences se font toujours avec quelque
chose d'autre. Le désir de liberté
s'évanouira finalement, laissant place
à la liberté même. Quand la
liberté se connaît elle-même,
elle seule demeure. En ce moment vous êtes
occupé par d'autres désirs. Quand ils
vous auront tous quitté, la liberté
elle-même demeure ra et se
révélera à vous.
David : Papaji, vous dites qu'il est
très aisé de découvrir
l'éveil et cependant je vous ai souvent
entendu dire que le nombre de personnes qui se sont
entièrement éveillées à
leur propre Soi peut être compté sur
les doigts d'une main. Si c'est tellement facile,
pourquoi si peu ont-ils réussi ?
Papaji : C'est tellement facile, parce que
vous n'avez pas à travailler pour cela.
C'est tellement facile parce que vous n'avez pas
à aller quelque part pour l'obtenir. Tout ce
que vous avez à faire, c'est de rester
tranquille. Atteindre la liberté est par
conséquent très facile. Les gens
disent que c'est difficile uniquement parce que
leur mental est toujours occupé ailleurs. La
liberté elle-même n'est pas difficile.
Ce qui est difficile c'est d'abandonner
l'attachement aux autres choses. Il est possible
que s'affranchir des attachements soit difficile et
pour cela vous devez prendre une décision.
Vous pouvez la prendre maintenant ou la remettre
à votre vie prochaine.
David : Est-il nécessaire d'avoir un
maître lui-même réalisé
pour réussir ?
Papaji : Absolument ! Absolument ! Autrement
comment savoir que l'on est sur le bon chemin ?
David : De nombreuses personnes en Occident,
Papaji, ont passé beaucoup de temps à
chercher un maître réalisé.
Comment peuvent-elles le trouver ? Quel avis
pourriez-vous leur donner sur le moyen d'en trouver
un ?
Papaji : Elles ne peuvent pas trouver. Elles
ne peuvent pas trouver. Un véritable
maître n'est pas révélé
par la vue. Si les gens cherchent à le
découvrir au moyen des sens, ils n'auront
pas un jugement correct, car un maître est
au-delà des sens et au-delà de tout
jugement.
Quand vous voulez être libre, la
liberté elle-même est
déjà là. Mais vous n'avez pas
acquis l'habitude de vous fier à elle ; vous
ne connaissez pas le langage de la liberté,
le langage de la vacuité, le langage de
l'amour. Vous ne comprenez pas ces choses, car vous
vous êtes vendu à d'autres fins.
Par conséquent, vous ne comprenez pas ce
qu'est réellement cette liberté, bien
que vous en ayez un désir intense. Quand
cela survient, la liberté, par compassion,
prend une forme physique pour vous parler dans
votre propre langue afin que vous puissiez
comprendre ce qu'elle est réellement.
Elle vous enseigne alors : "Je suis ton propre
Soi." Elle pénètre votre propre Soi
et devient un avec lui. Le rôle d'un
enseignant est de vous montrer : "Je suis ton
propre Soi. Je suis Cela Même." C'est le
rôle de l'enseignant. Pour un certain temps,
la liberté devient un enseignant simplement
pour vous informer du fait que vous êtes
Cela. Vous n'écoutez pas le Cela impersonnel
qui est toujours au dedans de vous. Par
conséquent, il devient un enseignant. Cela
devient un enseignant afin de vous dire : "Vous
êtes Cela Même." Quand vous comprenez
ceci, vous voyez que vous et l'enseignant ne font
qu'un.
David : Comme vous, Papaji, Ramana Maharshi
a dit qu'on ne peut pas distinguer un maître
véritable de celui qui ne l'est pas, mais il
a précisé qu'il existait deux signes
que l'on devrait rechercher. On devrait
vérifier si l'on ressent ou non la paix en
sa présence et observer s'il agit de
façon égale avec tous les êtres
autour de lui. Etes-vous d'accord sur
l'utilité de ces indications ?
Papaji : Bien sûr, je suis d'accord.
Vous pouvez facilement être
égaré par les causeries que donne un
enseignant, par les discours qu'il tient. Mais si
vous sentez que votre mental est calme
auprès de lui, qu'une expression de bonheur
et de paix l'entoure, ce sont peut-être les
symptômes extérieurs d'un
véritable enseignant. Tout le monde ne
ressent pas cette paix. Seuls ceux qui aspirent
intensément à la liberté
peuvent la ressentir, pas les autres.
Donc, quand vous allez voir un enseignant, restez
tranquille, tout simplement. Il n'est pas besoin de
poser des questions. N'attendez aucune
réponse de sa part. Asseyez-vous en silence
et ressentez si votre esprit est calme ou non. S'il
est calme, vous pouvez en conclure qu'il est
l'homme qui peut vous enseigner, auprès de
qui cela vaut la peine de rester.
David : Papaji, vous recommandez aux gens de
s'asseoir en satsang auprès d'un
maître réalisé et de rester
tranquille. Lorsque le maître meurt et que le
satsang physique n'est plus possible, que devrait
faire ensuite le disciple ?
Papaji : Si c'est un disciple
véritable, il ne sera pas d'accord sur le
fait qu'un maître puisse jamais mourir. Le
corps meurt, mais le maître n'est pas le
corps. Tous les corps vont mourir, mais le
maître n'a jamais été un corps.
Par conséquent, la mort du corps n'a pas
d'importance pour le disciple, car il sait que le
maître est quelque chose d'autre. Le
maître se tient toujours au dedans du
Cur d'un disciple. Le disciple qui sait ceci
n'a besoin de rien d'autre. Il sait parfaitement
bien : "Mon maître ne me manque pas, il est
ici-maintenant, toujours en moi." Voici la relation
entre le maître et le disciple.
David : Si le disciple a cette attitude,
alors la réalisation est possible
après la mort du maître ?
Papaji : Si le disciple...?
David : Si le disciple a cette attitude,
"mon Guru n'était pas le corps qui est mort,
il est mon propre Soi", alors, avec cette attitude,
il peut encore réaliser le Soi. Il n'a pas
besoin de chercher un autre enseignant
physique.
Papaji : L'enseignant est celui qui
enlève le corps et le mental du disciple.
S'il ne l'a pas fait ou ne peut pas le faire, il ne
peut être accepté en tant que
véritable enseignant. Afin de chercher un
autre enseignant, il vous faut un mental et un
corps, n'est-ce pas ? Si vous n'avez plus de mental
ni de corps, où chercherez-vous ? Comment
chercherez-vous ?
David : Papaji, pouvez-vous s'il vous
plaît décrire votre propre
éveil et, en particulier, le rôle qu'a
joué à cette occasion votre propre
maître, Ramana Maharshi ?
Papaji : C'est une longue histoire.
David : Pouvez-vous nous en donner une
version raccourcie ?
Papaji : C'est une longue histoire. Pour la
raconter en entier je devrais commencer dès
l'enfance. Cependant, je peux commencer au moment
où je suis allé voir Ramana Maharshi.
J'entrai dans son ashram et tout était
tranquille, silencieux. Cet homme était la
tranquillité même, une incarnation du
silence. Il ne parlait à personne. Il y
avait là un formidable silence. Je n'avais
jamais vu quelqu'un d'aussi silencieux. Le mental
des gens qui allaient le voir ne
pénétrait pas le hall où il
vivait. Il se tenait simplement assis et le silence
était présent.
Il disait : "Restez tranquille, restez tranquille",
mais la plupart des gens ne comprenaient pas la
signification de ce qu'il essayait de dire.
Même aujourd'hui, les gens ne comprennent
toujours pas ce qu'il voulait dire.
Ses paroles concernaient de nombreux sujets :
comment être libre, comment obtenir
l'illumination, et il disait parfois des choses
telles que : "Il vous faut la Grâce." Mais le
plus souvent il disait, en tamil, "Summa iru" ce
qui signifie "Restez tranquille". La plupart des
gens ne comprenaient pas ce que cela signifiait
véritablement, mais je l'ai saisi
immédiatement. Actuellement j'utilise
beaucoup cette phase, car je suis de l'avis de mon
maître que le meilleur enseignement est :
"Restez tranquille".
Si un homme qui est le silence même vous dit
de rester tranquille, alors cette phrase vient de
l'autorité et fait autorité. Elle est
immédiatement opérationnelle. Si un
homme ordinaire vous dit de rester tranquille, cela
ne marche pas, mais lorsqu'un homme qui est le
silence même vous le dit, alors,
automatiquement, vous devenez tranquille.
David : Pouvez-vous décrire ce qui
s'est passé le jour où vous avez
finalement saisi ? Comment cela est-il
arrivé ?
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Papaji
: Depuis l'enfance j'étais un adepte de
Krishna au point qu'il se manifestait même
devant moi dans une forme physique. Je pouvais
l'identifier par tous mes sens de la même
manière que je voyais les choses de la vie
courante.
J'avais passé environ quatre jours à
Adi-Annamalai de l'autre côté de la
montagne Arunachala. À mon retour, le
Maharshi me demanda où j'étais
allé.
Je répondis, "De l'autre côté
de la montagne, j'étais seul et je jouais
avec Krishna."
Oh, très bien, ainsi vous jouiez avec
Krishna ! s'exclama-t-il.
Oui, Monsieur, j'ai joué avec
Krishna. Il est mon ami.
Le voyez-vous maintenant ?
Non Monsieur, je ne le vois pas.
Il me dit alors : "Ce qui apparaît et
disparaît n'est pas réel. Celui qui
voit est resté. Vous l'avez vu, il a
disparu. Le même témoin est
resté. Maintenant vous êtes ici
également, celui qui voit est resté.
Maintenant découvrez qui est celui qui
voit."
"Celui
qui voit" n'étaient que des mots, mais ils
me frappèrent avec un tel impact que je
devins celui qui voit. Je devins celui qui
voit.
De nos jours, lorsque je donne un satsang, je dis
aux gens : "Ne vous accrochez pas au mot. Allez
à la racine du mot. Allez à ce que le
mot décrit ou indique. Si vous le faites,
vous obtiendrez instantanément la
compréhension véritable."
|

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Lorsque
vous prononcez le mot "liberté" par exemple,
allez immédiatement à la
liberté et demeurez-y. Quand quelqu'un dit,
"allons déjeuner", il est question de
nourriture et vous devenez instantanément un
avec la nourriture. Pourquoi ne pouvez-vous pas
faire ainsi lorsque je dis le mot "liberté"
?
Lorsque nous parlons de liberté, nous devons
être un avec la liberté, nous devons
sentir la liberté, l'apprécier. Mais
cela ne se produit pas. Avec les autres choses le
mot vous emmène au bon endroit, mais quand
je dis le mot "liberté", vous n'allez pas au
bon endroit pour le comprendre. Nous avons besoin
de tellement de satsangs, de tellement
d'enseignants pour le mot "liberté", mais
malgré tout nous n'en saisissons pas le
véritable sens. Qu'est-ce qui ne va pas ?
Nous sommes attachés ailleurs.
David : Papaji, de nombreuses personnes en
Occident ont essayé différentes
techniques de méditation. Certaines d'entre
elles ont médité très
intensément pendant de nombreuses
années. Je vous ai entendu dire plusieurs
fois que de telles pratiques n'apportent pas
l'illumination. Pourriez-vous, je vous prie,
expliquer pourquoi vous pensez ainsi ?
Papaji : Tout d'abord, la méditation
ne sert qu'à fatiguer votre corps et votre
mental afin que vous vous en lassiez. Puis
l'idée suivante peut se présenter :
"Peut-être existe-t-il quelque chose
d'autre." Grâce à cette pensée,
vous irez peut-être en quête d'un
véritable enseignant. Si vous le trouvez, il
ne vous dira pas de méditer, il ne vous
donnera pas de méthode. Il vous dira
simplement : "Restez tranquille." Il ne vous dira
pas de faire quelque chose ou d'arrêter de
faire quelque chose. Les conférences sur ce
que vous devriez faire ou ne pas faire viennent de
la part des prêcheurs, non des enseignants.
Le véritable enseignant n'a pas
d'enseignement, pas de "fais" et de "ne fais pas".
Il vous dit simplement : "Restez tranquille." Il
n'y a rien d'autre qu'un enseignant puisse
dire.
Et cela va marcher. C'est le meilleur enseignement
qu'un enseignant puisse donner. Comme je vous le
disais précédemment, s'il vous dit de
rester tranquille, vous n'entendez pas seulement
les mots, vous devenez effectivement la
tranquillité. Où est le
problème ? Pourquoi tout le monde
trouve-t-il ceci si difficile ?
C'est la même chose dans les satsangs. Je dis
aux gens, Examinez, scrutez, demandez-vous "qui
suis-je ?", et ils répondent : "Nous ne
pouvons pas le faire, nous ne le pouvons pas. Nous
avons essayé, mais cela nous crée des
problèmes, cela nous occasionne de fortes
tensions et des maux de tête." Seules
quelques rares personnes réussissent. Les
autres échouent parce que leur mental est
occupé ailleurs. Je ne sais pas pourquoi il
en est ainsi. Je ne peux pas expliquer la raison
pour laquelle cela marche instantanément
chez certaines personnes et pas chez d'autres.
Si vous demeurez tranquille, vous tomberez amoureux
de Cela, ce silence et cette paix. Quoi qu'ils
fassent, tous les gens ont besoin de joie et de
paix. Et il ne peut y avoir de joie, de paix,
d'amour, de beauté en quoi que ce soit
hormis ce silence qui est toujours ici-maintenant,
au-dedans de vous. Voilà pour quoi je dis
toujours que vous n'avez pas besoin de
méditation. Pour méditer il vous faut
un mental et lorsque vous l'utilisez le
résultat ne peut qu'être mental. Il
vous faut également votre corps. On vous dit
de vous asseoir d'une manière
spéciale, de positionner vos mains et vos
pieds d'une manière particulière. Les
activités physiques vous donnent des
résultats physiques, les activités
mentales, des résultats mentaux. Mais ce
dont je parle est au-delà du corps,
au-delà du mental. On ne peut pas
l'approcher par le mental ni par des moyens
physiques.
Suivre certaines idées spirituelles qui vous
semblent bonnes ne peut conduire qu'à un
résultat intellectuel. Donc, fuyez toute
idée. N'essayez pas d'approcher ce silence
par des voies physiques, mentales ou
intellectuelles. Abandonnez simplement toute
notion, toute idée, tout ce que vous avez
entendu et lu, et vous découvrirez que vous
êtes le vide même.
David : Beaucoup de gens ont essayé
d'être tranquilles, immobiles, mais sans
succès. Que font-ils de travers ?
Papaji : Ils devraient abandonner
l'intention de rester tranquilles. S'ils ne peuvent
rester tranquilles, je leur dirais : "Abandonnez
l'intention de rester tranquilles." S'ils le font,
qu'arrivera-t-il ?
David : Vous dites fréquemment aux
gens, Papaji, de se demander "Qui suis-je ?"
Pourquoi ceci marche-t-il quand toute autre
méthode échoue ?
Papaji : Parce que ce n'est pas une
méthode. Les méthodes émondent
les branches, mais l'investigation frappe à
la racine, à la racine du mental. Une
branche que vous avez coupée repoussera
après un certain temps. Mais si vous allez
à la racine du mental et arrachez la racine,
il ne pourra jamais revenir. L'investigation
déracine le mental. Quand vous vous demandez
"Qui suis-je ?", vous frappez à la racine et
détruisez le mental d'une manière
permanente. En fait, il serait plus précis
de dire que par l'investigation vous
découvrez qu'il n'existe pas de mental du
tout.
"Je" est le mental. Lorsque vous vous demandez :
"Qui suis-je ?", "je" s'interroge lui-même
pour découvrir la vraie nature du mental.
Personne ne s'est jamais demandé : "Qui
suis-je ?", personne. Les gens demandent toujours :
"Qui êtes-vous ? Qui est-il ? Qui est-elle ?"
Mais personne ne se demande : "Qui suis-je ?"
Lorsque vous vous interrogez ainsi pour la
première fois, vous ne frappez pas seulement
à la racine du mental, vous frappez à
la racine de toute création, parce que le
"je", le mental, est la source de toute
création. Lorsque vous faites
l'investigation, le "je" n'est pas seul à
disparaître, mais la création
elle-même s'évanouit également.
Vous découvrez qu'il n'y a pas de
créateur, pas de création et pas
d'êtres créés. Ce "Qui suis-je
?" est un outil tellement puissant qu'il vous
emmène dans les profondeurs du Soi, en ce
lieu où vous découvrez que ni vous ni
la création n'ont jamais existé.
David : Beaucoup de gens se sont
demandé "Qui suis-je ?" sans obtenir la
bonne réponse. Le mental était
toujours là. Devraient-ils continuer
à se poser cette question jusqu'à ce
qu'ils obtiennent la bonne réponse ?
Papaji : Non, une fois seulement. Si vous le
faites correctement, vous n'avez besoin de poser la
question qu'une seule fois. Faites-le correctement
et cela frappe au bon endroit. Quand vous vous
demandez "Qui suis-je ?", n'attendez aucune
réponse. Vous devez vous débarrasser
de l'espoir d'obtenir une réponse. Vous ne
devez pas faire l'investigation avec l'intention
d'aboutir quelque part, d'obtenir une
réponse. L'objet de cette question n'est pas
d'obtenir une réponse. C'est plutôt de
se perdre, comme une rivière se perd dans
l'océan. Elle ne va pas à
l'océan pour rester rivière, elle va
à l'océan pour se perdre. Dans
l'enquête "Qui suis-je ?", il y a fusion avec
la divinité, avec le Soi dans la
vacuité même. Restez simplement
tranquille et voyez ce qui se passe.
Lors de cette investigation on ne doit pas attendre
de réponse. Quand l'interrogation est
terminée, le "je" se trouve liquidé.
"Qui suis-je ?" Qu'est-ce qui peut venir
après ce "je" ? Vous devenez Ce dans quoi le
"je" s'est déversé. Ce lieu ne peut
être que la vacuité.
David : Papaji, vous dites
fréquemment : "La Vérité
exalte une personne sainte." Vous dites
également qu'une personne sainte est celle
dont le mental est sans tache, pur,
immaculé. Et cependant, vous ne demandez
jamais à quiconque de rendre son mental sans
tache, pur ou immaculé. Comment la
Vérité peut-elle nous exalter si nous
ne faisons rien pour rendre notre mental pur, sans
tache, immaculé ?
Papaji : Vous ne pouvez pas rendre le mental
pur. Le mental lui-même est poussière.
Vous ne pouvez pas nettoyer la poussière
avec de la poussière. Imaginez que vous
vouliez nettoyer un miroir poussiéreux. Lui
apporter davantage de poussière c'est
l'ajouter à la couche initiale. Nettoyer le
mental c'est cela : ajouter de la poussière
à la poussière. Toutes vos tentatives
pour nettoyer le mental par la méditation ou
le yoga échoueront, car elles ne feront
qu'ajouter de la poussière à la
poussière déjà
présente. Donc, ce que je dis c'est :
"Restez tranquille." Si vous restez tranquille le
miroir lui-même s'enlève afin que la
poussière ne puisse se poser nulle part.
C'est ce que je veux dire par sainteté. La
Vérité exalte la sainteté et
vous devenez saint en enlevant le miroir du
mental.
Lorsque vous êtes devant un miroir, votre
visage s'y reflète. Ce reflet est une tache,
une impureté. Tant que cette tache est
là, vous n'êtes pas saint. Comment
enlever ce reflet ? Simple. Vous jetez le miroir.
Qu'arrivera-t-il alors au reflet ? Il retournera
à votre visage. Si vous jetez le mental
pendant une seconde, juste une seconde, la
sainteté se révélera
elle-même et vous fusionnerez avec elle.
C'est pourquoi je dis : "La Vérité
magnifie une personne sainte." Tous les objets que
vous voyez autour de vous sont des reflets dans le
miroir de votre mental. Tout objet est de la
poussière. Jetez le miroir et il n'y aura
plus de mental, plus d'objet et plus de
poussière.
David : La plupart des gens, Papaji, pensent
que l'illumination peut être atteinte
après une longue période de dure
préparation. Qu'est-ce qui ne va pas dans
cette croyance ?
Papaji : C'est faux du début à
la fin. Toute croyance est fausse. Pourquoi
devriez-vous croire en quelque chose ? Avez-vous
besoin de croire que vous êtes David Godman ?
Vous en êtes tout à fait sûr,
n'est-ce pas ? Avez-vous besoin d'interroger
quelqu'un d'autre ? Allez-vous dire à
Madhukar : "Dites-moi, je vous prie, où se
trouve David Godman. Vivait-il dans cette maison
?"
Il vous dira : "Vous êtes David Godman et
ceci est votre maison." Comment avez-vous perdu la
connaissance infaillible et la conviction de qui
vous êtes réellement ? Vous ne vous
engagez pas dans une préparation difficile
pour découvrir qui vous êtes si vous
le savez déjà. Vous vous attachez
à des idées fausses. Parce que vous y
croyez, vous finissez par penser que vous avez
quelque chose à faire pour être ce que
vous êtes déjà. Vous vous
coincez dans ces choses et oubliez où est
votre véritable maison.
David : Je pense que c'est un
problème majeur en Occident, Papaji. Les
gens ne sont pas convaincus d'être
prêts pour la réalisation dans
l'instant. Ils pensent tous qu'ils doivent faire
quelque chose.
Papaji : Bien sûr. C'est ce que
j'entends dire. C'est pourquoi les professeurs de
yoga ont beaucoup de succès en Occident.
J'ai vu des centres de yoga jusque dans de petits
villages. Il y a environ cinq mille professeurs de
yoga en Europe. J'ai parlé à certains
d'entre eux et ils réussissent fort
bien.
J'ai
demandé à l'un d'eux :
"Qu'enseignez-vous ?" Il me répondit :
"Comment rester jeune et en forme jusqu'à
l'âge de quatre-vingt-dix ans." C'est le but
de la plupart d'entre eux et si c'est ce que vous
voulez obtenir du yoga, il peut vous aider à
le réaliser.
De nombreux livres sur le yoga sont vendus en
Occident, j'en ai même vus à
l'étal sur le trottoir. L'un d'entre eux
était Yoga et sexe, vous avez
dû le voir.
Ainsi, le yoga enseigné en Occident vise
à maintenir la santé et la
vitalité du corps. Je me souviens d'une
jeune fille à Düsseldorf. Elle semblait
avoir environ vingt ans et paraissait en pleine
forme et très heureuse. Je l'ai vue
pratiquer la méditation, aussi je lui ai
demandé : "Lorsque vous méditez, sur
quoi méditez-vous ?"
Elle répondit : "Je veux rester jeune
longtemps. J'ai actuellement vingt-sept ans et je
veux rester en bonne santé jusqu'à
quatre-vingt-cinq ans."
Je lui
ai donné le nom de Ratna, ce qui signifie
"diamant". J'ai rencontré son ami et je l'ai
nommé Ratnasagar, ce qui signifie
océan de diamants'. Tous deux
étaient des gens très bien, mais ils
n'obtenaient aucun résultat de leur
méditation. Personne n'obtient de
véritable résultat par la
méditation.
David : Je désire vous poser des
questions sur le bonheur, Papaji. Je vous ai
entendu dire que personne au monde n'est heureux,
que les gens croient seulement l'être.
Comment pouvez-vous justifier cela ?
Papaji : Parce que personne n'est heureux
dans ce monde. C'est une déclaration
véridique. Je n'ai jamais vu une personne
heureuse. J'ai voyagé dans le monde entier
et, dans chaque pays que j'ai visité, tous
ceux que j'ai vus souffraient. Tout le monde
souffre, même les gens les plus riches.
Une fois, en Suisse, j'ai rencontré un homme
très riche. Je suis allé le voir
parce que je m'étais occupé de son
fils en Inde. Ce garçon avait eu des
problèmes mentaux et quelqu'un lui avait
suggéré : "Allez voir Poonjaji
à Rishikesh. Vous irez mieux si vous restez
avec lui." Ce garçon resta avec moi pen dant
un an environ. Il était un peu
paranoïaque ou schizophrène, mais il
retrouva l'équilibre après être
resté avec moi. Il fit le tour de l'Inde
avec moi Lucknow, Haridwar, Rishikesh, Delhi
et Bombay avant de retourner en Suisse.
Son père m'invita lors de mon voyage suivant
en Europe. Il me logea dans un appartement
panoramique au dernier étage d'un immeuble.
De toute évidence cet homme était
très riche, mais il ne pouvait dormir la
nuit. Il commençait par boire plusieurs
verres, puis prenait trois ou quatre
comprimés de somnifère. Malgré
cela, il ne pouvait dormir.
Je lui demandais : "Pourquoi ne pouvez-vous pas
dormir ? Je vous ferai dormir. Décidez
à quel moment vous souhaitez dormir et j'y
veillerai."
Son problème venait de ce qu'il avait une
usine de montage de voitures 5000
travailleurs à la chaîne, plus tout le
personnel administratif. C'était un complexe
très important. Les téléphones
sonnaient toute la nuit expéditions,
ventes, réservations. C'était sa
manière d'être. Il était
tellement occupé qu'il ne pouvait
dormir.
Je lui dis : "Emmenez-moi demain dans votre voiture
et ne me demandez pas où nous allons."
Le jour suivant il me dit : "Je ne puis venir avec
vous parce que des visiteurs sont venus ici avec
des commandes."
Lorsque vous avez continuellement des affaires en
tête des choses à faire
aujourd'hui, demain ou le jour suivant les
pensées correspondantes vous occuperont tout
le temps l'esprit. Comment voulez-vous dormir si
vous ne les rejetez pas ? En Occident les gens
travaillent sans arrêt. Ils n'ont pas le
temps de dormir. Etes-vous nés seulement
pour travailler ou pour être en paix ? Que se
passe-t-il en Occident ? Travail, travail et encore
plus de travail. Cela coûte aux gens leur
santé, mais néanmoins ils ne prennent
pas de repos. Voilà pourquoi ils ne sont pas
heureux, voilà pourquoi ils ont des
problèmes.
Ils pensent : "J'ai un compte en banque bien garni,
un bel appartement et une voiture du modèle
le plus récent." Mais ceci n'aide pas un
homme à être heureux. Pour être
heureux, la meilleure recommandation est le
contentement. Quoi que vous ayez, soyez-en
satisfait. Si vous voulez comparer votre fortune
à celle des autres, regardez les gens qui
ont moins que vous et soyez heureux. Ne regardez
pas un quelconque sheikh millionnaire et ne vous
sentez pas jaloux qu'il soit plus riche que vous.
Regardez les gens moins favorisés que vous :
"Regarde cet homme. Il mendie. Dieu merci, j'ai
plus d'argent que lui. J'ai de la nourriture et je
n'ai pas besoin d'avoir en main une sébile
de mendiant." Si vous avez cette attitude, vous
dormirez très bien.
Henry Ford, fondateur et propriétaire de
Ford Motors, était à une
époque l'homme le plus riche au monde. Mais
il ne pouvait pas manger normalement. Il dit une
fois : "J'observe mes ouvriers quand ils
déjeunent. Je vois les quantités
qu'ils mangent. Je sens que je ne pourrais jamais
manger autant de nourriture parce que mes docteurs
m'ont recommandé de manger très
peu."
Etes-vous venus ici-bas pour ne pas manger, pour ne
pas dormir ? Etes-vous ici seulement pour gagner de
l'argent, de l'argent que vous laisserez
derrière vous à votre mort ? Je ne
suis pas en train de dire : "Ne gagnez pas d'argent
du tout." Je dis simplement : "Gagnez de l'argent,
travaillez et vivez bien, mais n'allez pas vous
perdre pour cela." N'oubliez pas que vous
êtes venus ici pour être en paix et non
pour gagner de l'argent.
David : Beaucoup de gens vivent le bonheur
en s'adonnant aux plaisirs physiques. Ce bonheur
dont ils font l'expérience est-il celui que
vous connaissez d'être votre propre Soi, ou
est-ce un bonheur d'une nature différente
?
Papaji : Non, non. Etre votre propre Soi est
le seul bonheur véritable. Si vous le
recherchez ailleurs, où que ce soit, vous ne
faites que vous fatiguer pour découvrir que
ce que vous vous évertuez à obtenir
n'est pas le bonheur véritable. Si vous avez
besoin de répéter encore et toujours
le processus pour obtenir le bonheur, alors ce que
vous obtenez n'est pas le bonheur véritable.
Vous voulez répéter le processus
toujours plus parce que l'expérience de
bonheur que vous avez obtenue chaque fois ne vous a
pas pleinement satisfait. Voilà pourquoi
vous le répétez.
David : Je ne parle pas du processus,
Papaji, je parle du résultat. Si je suis
tout à coup extrêmement heureux de
faire quelque chose, mon bonheur est-il le
même que votre bonheur, ou est-il
différent ?
Papaji : Le bonheur est un. Le bonheur est
un. Mais lorsque vous l'attribuez à quelque
chose qui n'est pas permanent, alors il est
différent. Vous dites "votre bonheur". Le
bonheur que je désigne n'est pas celui que
vous qualifiez comme étant "mon" bonheur ou
"votre" bonheur. Je désigne un bonheur qui
n'est pas attribué, qui n'est pas
gagné, et non "mon" bonheur ou "votre"
bonheur. Voilà l'unique différence.
Vous employez "mon" et "votre". Si vous enlevez
"vous" et "moi", il n'y a pas de
différence.
David : Qu'en est-il des états tels
que l'extase et la félicité ?
Sont-ils des expériences du mental ou
viennent-ils du Soi ?
Papaji : L'extase est un état mental.
Elle demeurera pendant un certain temps, puis elle
s'affaiblira à nouveau et disparaîtra.
De nombreuses personnes entrent en extase rien
qu'en entendant un poème ou en chantant un
chant, ou par d'autres moyens. On peut entrer dans
des états extatiques, mais ils s'en iront
car ils dépendent de circonstances
transitoires.
La félicité est différente.
Elle peut être comparée à
l'aube avant le lever du soleil. Quand arrive
l'aube vous savez que le soleil suivra
bientôt. Le soleil n'est pas là, mais
il montre certains signes au-dessus de l'horizon.
Donc, lorsque vous ressentez une
félicité sans l'attribuer à un
objet extérieur, vous focalisez sur l'aube
du Soi. Pour voir le lever du soleil vous ne
regardez pas vers l'Ouest, mais vers l'Est, vers le
point d'où viennent les rayons. Lorsque
vient la félicité, fixez-vous sur
elle, devenez un avec elle. Lorsque vous faites
l'expérience de Cela d'où
émane la félicité, cette
dernière sera rejetée. La
félicité est également un
état mental. À la fin elle sera
rejetée.
|
David
: Devons-nous la rejeter consciemment, ou cela
se produira-t-il automatiquement ?
Papaji : Cela se produira
automatiquement.
David : Certaines personnes disent que la
félicité est un obstacle à la
réalisation et que l'expérience
finale est paix et immobilité.
Papaji : C'est une idée qui vient du
yoga. Le niveau de la félicité, ou
anandamaya kosha, est une des cinq enveloppes qui
limitent le "je". En premier il y a l'annamaya
kosha, l'enveloppe physique, puis le pranamaya
kosha, l'enveloppe des sens ou vitale', puis
le manomaya kosha, l'enveloppe mentale, puis le
vijnanamaya kosha, l'enveloppe intellectuelle, et
finalement l'anandamaya kosha, l'enveloppe de
félicité. Dans le système du
yoga, vous devez rejeter une par une toutes ces
enveloppes, y compris l'enveloppe de
félicité. Vous devez enlever un par
un tous ces attachements. Lorsque vous avez
enlevé votre attachement au corps physique,
aux sens, au mental et à l'intellect, la
félicité viendra. La
félicité est présente quand
l'intellect s'en va. Mais on ne devrait pas s'y
attacher. La plupart des yogis s'attachent aux
états de félicité et ne vont
pas au-delà. Ceci est la conséquence
du système du yoga qui a pour but d'obtenir
les états de félicité.
Ne vous attachez pas à ce kosha
[enveloppe] finale. Ne vous contentez pas
de la félicité. Demeurez tranquille
et laissez la félicité devenir Cela.
Au fur et à mesure que le mental absorbe la
félicité, il la devient. Après
un certain temps, il ne sera plus question de
rejeter la félicité, car, venant de
l'autre côté, de l'au-delà du
mental, du non-mental, la liberté même
vous recevra et vous étreindra. À ce
stade, personne ne peut rejeter la
félicité.
Si vous pouvez ressentir la félicité,
c'est très bien. La félicité
du Soi, l'atman, s'appelle atmananda. Elle atteint
l'atman lui-même. Bien que tout soit parti
quand vous atteignez cet état, ce n'est pas
encore l'état final. Le "non-mental", qui
est en relation avec le mental, est toujours en
vie.
|

|
Si
vous pouvez atteindre cet état de
non-mental, c'est très bien. Quand vous avez
atteint ce stade votre travail est terminé,
car, dès lors, c'est la tâche de
l'au-delà. Cet au-delà est
impénétrable. Il vous prendra en
charge et travaillera sur vous d'une très
belle manière. Il se révélera
lui-même de plus en plus à chaque
instant qui passe. Il vous montrera une
beauté différente, un amour
différent et une forme différente
tellement enivrants que vous serez toujours uni
à lui. "Il" sera uni à lui.
Même si le corps s'en va, vous ne pouvez vous
défaire de lui. Ceci peut être
décrit comme l'ultime, comme
l'"ultimeté".
David : Papaji, quelles sont les
différences entre le non-mental, le mental
mort et le mental silencieux ?
Papaji : Mental silencieux signifie demeurer
temporairement tranquille. C'est simplement une
suppression des objets dans le mental. Cela peut se
produire de nombreuses fois, mais ne dure pas.
Le mental immobile est également temporaire,
il peut résul ter de la méditation,
de la concentration. C'est comme la flamme d'une
bougie. Quand il n'y a pas un souffle d'air, la
flamme est immobile. Quand le vent se lève,
la bougie vacille et s'éteint. Le mental
immobile s'envole dès qu'il rencontre le
vent d'une nouvelle pensée.
En ce qui concerne le non-mental, c'est la
première fois que j'entends cette question.
Personne auparavant, en Inde ou en Occident, ne m'a
jamais interrogé à ce sujet. Je suis
très heureux d'aborder cette question pour
la première fois.
Avant que nous parlions du non-mental, nous devons
voir ce qu'est le mental. Partons de la conscience.
Il vous arrive de souhaiter voir votre apparence
dans un miroir. D'une façon similaire, la
conscience veut parfois se contempler pour voir ce
qu'elle est. Une vague se lève dans la
conscience et se demande, "Qui suis-je ?" Cette
vague se levant dans la conscience s'imagine
séparée de l'océan. Cette
vague devient "je", le soi individuel. Une fois
séparé, ce "je"
dégénère un peu plus et se met
à créer. En premier, ce sera
l'espace, l'immense vide de l'espace infini, sans
frontière. Et, avec cet espace, vient la
création du temps, car partout où il
y a l'espace, il doit y avoir le temps. Ce temps
devient le passé, le présent et le
futur et, à partir d'eux, les attachements
prennent naissance. Toute la création prend
naissance au sein du passé, du
présent et du futur. C'est ce qu'on nomme
samsara. Samsara signifie temps. Samsara est le
passé, le présent et le futur sans
fin. Tout ce qui est né dans le temps et qui
y demeure finira dans le temps. Et tout ceci est
mental. Le "je" s'est présenté et a
créé l'espace, puis le temps, puis le
samsara. Ce "je" est maintenant devenu le mental et
ce mental est "je".
Alors, à un moment donné, un intense
désir de liberté surgit de la
conscience même. À l'origine
c'était une descente depuis la conscience,
du "je" à l'espace, au temps, au samsara.
À présent, c'est une ascension. Dans
cette ascension, les attachements aux objets
physiques, puis au vital, puis au mental, puis
à l'intellect s'en vont. Finalement, vous
retournez au "je" seul. Ce "je" est le mental
immobile.
Ce "je" a tout rejeté. Il est solitaire,
sans attachements. Il ne peut retourner au monde
des attachements, au samsara. Il a un désir
de liberté, il veut retourner au lieu de son
origine. Ce "je" qui avait pris naissance dans la
conscience retourne maintenant à la
conscience. Il prend la décision : "Deviens
non-mental maintenant", et par cette
décision le "je" n'est plus là, le
mental n'est plus là. Le "je", qui est le
mental, a été rejeté, mais il
existe encore quelque chose là, entre le
"je" et la conscience. Cette chose entre-deux est
nommée non-mental. Cette entité
entre-deux fusionnera avec la conscience et
deviendra alors la conscience même.
Regardez cette tasse [il désigne un
gobelet sur la table]. L'espace, le vide, est
à la fois à l'intérieur et
à l'extérieur. Nous nommons "espace
intérieur" l'espace du dedans et l'espace du
dehors est nommé "espace extérieur".
Pourquoi ? Parce que le nom et la forme de la tasse
séparent l'intérieur de
l'extérieur. Quand le nom et la forme sont
enlevés, l'espace intérieur et le
mahat, l'espace plus vaste, deviennent un. En fait,
ils furent toujours un. Du point de vue de l'espace
même, il n'y eut jamais d'intérieur ou
d'extérieur. Le nom et la forme ont fait
apparaître l'existence d'un intérieur
et d'un extérieur, mais l'espace n'a jamais
été touché par ces divisions
artificielles. De même, la liberté est
toujours là, jamais touchée par les
noms et les formes. "Nom et forme" sont "je". Quand
le "je" s'en va, les murs qui semblaient diviser la
conscience sont enlevés. Ceci devient
Ceci.
Lorsque vous retournez du mental à la
conscience, vous passez par cette phase de
non-mental. Dans cet état il y aura
l'impression, le souvenir : "Maintenant c'est le
non-mental." Graduellement, lentement, ce
non-mental retournera fusionner dans
l'au-delà. Mais je ne sais pas comment cela
se passe.
David : Le non-mental peut-il redevenir
mental ? Peut-il sortir ? Peut-il devenir
manifesté ?
Papaji : Un processus a eu lieu. À
présent, c'est la conscience même.
Pourquoi parler du mental et du non-mental ?
Dans l'ancien temps, quand un roi mourait sans
laisser d'héritier, un
éléphant royal était
envoyé pour désigner son successeur.
La tradition voulait que la personne que
l'éléphant soulevait et mettait sur
son dos, quelle qu'elle fut, devînt le
nouveau roi. Une fois, à cette occasion,
l'éléphant prit un mendiant et il
devint roi. Tout le monde était heureux. Les
ministres le saluèrent, lui donnèrent
des robes cousues d'or et le mirent sur le
trône. Cet homme, qui fut mendiant, n'avait
plus rien à faire. On faisait tout pour lui.
Tout venait à lui sans qu'il ait à le
demander. Les courtisans et les ministres savaient
tous comment être à son service. Il
n'avait plus à mendier. La nourriture lui
était servie aux moments opportuns, et la
nuit toutes les reines prenaient soin de lui. Une
fois qu'un mendiant a goûté au statut
de roi, voudra-t-il retourner dans son village et
mendier à nouveau ?
C'est ce qui se passe lorsque vous devenez
éveillé au fait d'être
conscience. La personne est toujours là, le
corps est toujours là, mais aucun personnage
ne pense : "Je dois faire ceci ou cela." À
la place, il y a une connaissance que la conscience
prend soin de tout. Si vous êtes conscience,
c'est à dire le roi, les cinq sens
deviennent les ministres qui vous servent.
L'activité des sens se poursuit
automatiquement, vous n'avez pas à penser
à eux. Si c'est l'heure pour le roi de
manger un pan [rires], le pan sera servi.
Si c'est l'heure du café, le café
sera servi.
Quand vous êtes conscience, le cerveau
devient premier ministre, les organes des sens
deviennent ministres, et tous vous servent. Vous
n'avez pas à penser du tout.
Pour que cela marche, il vous faut avoir
l'autorité et le pouvoir d'un
véritable roi. Si vous vous comportez en roi
sans en avoir l'autorité, personne ne vous
écoutera. L'autorité doit être
présente et cette autorité ne peut
venir qu'en étant la conscience
même.
Je vais vous raconter une histoire plaisante
à propos d'un autre roi qui voulait voir son
premier ministre de toute urgence, mais comme ce
dernier était absent du palais à ce
moment-là, le roi alla le voir chez lui.
La femme du premier ministre accueillit le roi et
lui dit :
Mon mari est dans la salle de puja.
Alors appelez-le, dit le roi.
Je ne peux pas l'appeler, répondit
l'épouse, je ne suis pas autorisée
à le déranger quand il est dans cette
salle.
Cependant le premier ministre avait entendu
l'arrivée du roi. Il sortit de la salle
vêtu de sa robe de puja et le roi lui demanda
: "Que faisiez-vous ?"
Le premier ministre ne répondit pas, ce qui
mit le roi très en colère parce qu'il
y vit un acte flagrant d'insubordination. Il appela
un de ses officiers de police et lui donna l'ordre
de l'arrêter. L'officier avança, mais
avant qu'il put mettre cet ordre à
exécution, le premier ministre
s'écria : "Attendez ! Attendez !" Le roi fit
alors un signe au policier et attendit une
explication. À la grande surprise de tous,
le premier ministre désigna le roi et intima
au policier l'ordre de l'arrêter. Bien
entendu, le policier, qui n'avait pas
autorité d'arrêter un roi, ne bougea
pas.
Puis le premier ministre donna l'explication
suivante au roi : "Quand vous avez dit
"arrêtez-le", le policier allait
exécuter votre ordre, car vous avez le
pouvoir de donner un tel ordre. Mais lorsque j'ai
dit, "arrêtez-le", le policier n'a pas
obéi, car je n'ai pas d'autorité sur
vous. L'ordre était le même dans les
deux cas, mais l'autorité était
différente. Vous aviez le pouvoir. Je ne
l'avais pas. Je n'ai pas répondu lorsque
vous êtes venu, parce que j'étais en
train de prononcer le mantra gayatri. Je n'ai pas
pu ensuite vous parler de ce mantra, car vous n'y
avez pas été initié.
Moi-même je ne suis pas habilité
à vous parler de ce mantra, je suis donc
resté silencieux."
Donc, si vous voulez avoir l'autorité d'un
roi, vous devez être la conscience
même. Alors les sens vous obéiront.
Tout sera beau, parce que tous les ordres viendront
de la conscience. Les rois peuvent se tromper, mais
la conscience prend toujours la bonne
décision au bon moment. Quand vous
êtes dans le non-mental, vous ne pouvez faire
aucun travail par vous-même. C'est simplement
la Grâce qui est présente et vous lui
obéissez. Vous-même, vous ne faites
rien, parce que le sujet agissant est parti. Le
mental n'est plus là. Toutes ses diverses
fonctions ont disparu. Vous demeurerez avec le
corps pour une période définie,
déjà décidée et durant
ce temps-là vous serez l'instru ment de la
conscience.
Certaines personnes ne peuvent pas supporter le
choc de la liberté pendant plus de
vingt-et-un jours. Cela a été
spécifié dans les livres. Imaginez un
homme qui, d'une manière inopinée,
gagne un milliard de dollars dans une loterie. Tant
de richesse arrivant soudainement peut le tuer. Il
pourrait avoir une crise cardiaque et mourir.
C'est parfois la même chose avec
l'illumination. Tant de bonheur arrivant
soudainement, d'une manière imprévue,
peut emporter le corps. Mais l'illumination ne sera
pas affectée.
Certaines personnes vivent longtemps après
l'éveil, unique ment pour en faire
bénéficier d'autres. Cette aide ne
vient pas d'une certaine "personne". Elle vient
directement de la cons cience. L'instructeur, qui
est conscience, sait que ce n'est pas "je" qui
travaille. Son attitude est : "J'ai
été désigné pour
parler, mais ce n'est pas "je" qui parle." Si
l'instructeur pense qu'"il" parle, ce n'est que de
l'arrogance. Ses paroles resteront sans effet.
Lorsque vous vivez cela directement, ce que vous
dites n'est pas votre affaire. Ce n'est pas votre
problème si quelqu'un est aidé ou
non, si les gens viennent vous voir ou non. Pour
vous, tout revient au même.
David : La conscience vous a donc
donné l'ordre d'enseigner. Est-ce bien ce
que vous dites ?
Papaji : La conscience...?
David : Vous a donné l'ordre
d'enseigner. Est-ce bien cela que vous dites ? Vous
exécutez seulement l'ordre.
Papaji : [longue pause] La
conscience et moi... sommes tellement devenus un,
je ne peux pas dire si "elle" peut "me" donner des
ordres.
David : Mais un certain pouvoir vous oblige
à donner des satsangs, n'est-ce pas ?
Papaji : Oui, un "certain pouvoir" comme
ceci : [il tend sa main devant lui], si je
veux boire de l'eau, dois-je dire : "Poonjaji,
prends le verre" ? Avant de le porter à la
bouche, vais-je dire à ma main : "porte-le
à la bouche" ? Et avant de boire, vais-je
donner l'ordre : "bois" ? [Papaji rit, prend le
gobelet et boit]. À cet instant, je n'ai
pas donné d'ordre à la main. Tout
ceci est moi, voyez-vous. Les gens qui sont
aidés ne sont pas autres'. La main est
mienne, l'estomac est mien et le besoin d'eau est
mien. Qui sont les autres ? Qui est autre que moi
?
Tout d'abord, qui est ignorant ? Si les gens le
disent, je ne les crois pas. Qui veut être
libre ? Si quelqu'un me le dit, je ne le crois pas.
Qui n'est pas déjà libre ?
Donc, quand les gens viennent me voir et disent :
"J'ai des problèmes, je suis
attaché", je pense qu'ils plaisantent, je
plaisante donc également : "Vous
n'êtes pas attachés, vous êtes
libres."
Ils demandent : "Cela prend-il beaucoup de temps
?"
Non, non, dis-je, vous pouvez l'obtenir
à l'instant même.
Tout cela est très drôle, aussi je le
considère comme tel. L'affirmation "je suis
enchaîné", n'est-ce pas une
plaisanterie ? Les gens qui parlent ainsi ne me
montrent ni chaînes, ni fers, ni prison.
Quelle sorte de prison est-ce ? Pour moi tout cela
est donc une vaste plaisanterie et je
l'apprécie.
David : Alors, quand vous regardez les gens
pendant le satsang, Papaji, vous ne voyez que des
gens éveillés qui font semblant de ne
pas être éveillés ?
Papaji : [longue pause] Oh, c'est
une question difficile, mais je dois y
répondre, car je réponds à
toutes les questions. Tout d'abord je les absorbe
tous et je donne à chacun une place dans mon
Cur, dans mon Cur. De même qu'un
amant donne une place à sa bien-aimée
dans son Cur, vous avez toujours une place
dans mon Cur. Donc je m'ouvre ici et je dis :
"Vous et moi, nous parlerons ensemble. Oui. Vous
n'êtes pas séparés de moi, vous
êtes au sein du Cur. Vous êtes
dans mon Cur. Parlons ensemble."
David : La Grâce agit dans le satsang,
Papaji. Vient-elle de vous, à travers vous,
ou est-elle tout simplement présente ?
Papaji : De la Grâce seulement. La
Grâce doit venir de la Grâce, n'est-ce
pas ? Une vague doit venir de l'océan. La
Grâce doit venir de la Grâce,
l'océan de Grâce.
David : Toutefois elle semble
s'écouler très fort auprès de
vous.
Papaji : Je ne sais pas.
David : Papaji, je vous ai plusieurs fois
entendu dire : "Je connais de nombreux
stratagèmes pour éveiller les gens.
Si un ne marche pas, j'en utilise un autre." Quels
sont ces tours et comment les utilisez-vous ?
Papaji : L'un d'eux est : "Restez tranquille
! Restez tranquille ! " Le second : "Ne pensez pas
du tout." Le troisième : "N'activez pas
votre mental." S'ils ne marchent pas, j'ai un
quatrième tour. Je dis : "Venez à moi
et je vous apprendrai le yoga. Je vous apprendrai
comment faire le shirshasana [une position de
yoga, la tête au sol et les pieds en
l'air]."
Je leur demande de se tenir debout devant moi, puis
je leur dis : "Maintenant tête en bas, pieds
en l'air, c'est le shirshasana." Je sais le faire
moi-même, alors je peux aisément leur
montrer.
Alors, tandis qu'ils se tiennent sur la tête,
ils disent : "Mais c'est la liberté que nous
voulons."
Pendant qu'ils sont encore dans cette posture, je
leur indique comment obtenir la liberté. Je
dis : "Restez tranquille, restez tranquille."
À ce moment-là, comme ils souffrent
un peu, ils écoutent. Quand les gens
commencent à avoir des problè mes par
l'abus de plaisirs sensoriels, ils viennent me voir
et m'écoutent. Quiconque se trouve la
tête en bas suffisamment longtemps commence
à souffrir et quand quelqu'un commence
à être attentif à sa
souffrance, il vient me voir. Je connais donc de
nombreux tours et je les ai souvent utilisés
en Occident.
Les gens qui viennent me voir à Lucknow sont
surtout des gens bien. Je n'ai aucun
problème avec eux. Ils viennent du monde
entier pour la première fois en Inde et
à Lucknow, et je suis très heureux
avec eux. Quand je leur parle ils
m'écoutent. Ils m'écoutent comme ils
écouteraient leur père ou toute autre
personne respectable qui donnerait de bons
conseils. Ils veulent en finir avec leur
souffrance, avec leur douleur mentale. Donc je leur
donne ce tour : je leur dis d'être
tranquilles. La plupart des gens aiment beaucoup ce
conseil, car je ne leur demande pas de faire
quelque chose. Ils obtiennent le bonheur et la paix
en ne faisant rien, en étant simplement
tranquilles.
Qui n'aspire pas au bonheur ? Qui n'aspire pas
à la paix ? Qui ne veut pas la beauté
? Tout le monde est intéressé. Donc
ils m'écoutent et je suis heureux. Tous en
profitent. Ils retournent dans leurs pays
respectifs en ambassadeurs de cette ville de
Lucknow. Et alors ils envoient leurs amis. Des
milliers de gens sont venus ici simplement parce
qu'ils ont entendu des commentaires favorables.
Personne ne se plaint de ce qui se passe ici. Il
n'y a rien à payer, il n'y a pas d'ashram,
il n'y a pas d'appels de fonds. Je vis dans ma
propre maison et j'appartiens à cet endroit.
Je vis ici depuis cinquante ans. J'ai
également passé quelques
années à l'étranger. J'aime
voyager, mais à présent mon âge
avancé m'oblige à rester ici.
Voilà pourquoi vous êtes ici. Il y a
peu de temps encore, je rendais habituellement
visite aux gens dans leur propre ville. Je n'aimais
déranger personne, voyez-vous.
Donc, à présent, il y a beaucoup de
monde ici et je suis très heureux qu'un
message de paix se répande. Nous en avons
énormément besoin.
Il y a deux mille six cents ans des messagers de
paix furent envoyés de l'Inde dans le monde
entier en les personnes de Mahendra et Mitra. Les
propres fils et fille de l'empereur Ashoka furent
envoyés comme émissaires. D'autres
personnes allèrent en Chine, au Japon et en
Corée avec la même mission. À
cette époque le monde entier était en
paix. Décidons donc d'envoyer à
nouveau ce message de paix et envoyons-le à
partir du même endroit. Le Bouddha est
originaire de cet état-ci. Je suis
très heureux que le message de paix soit
répandu une fois encore à partir de
l'endroit où vécut le Bouddha. De
nombreux touristes viennent dans cet état
pour visiter les lieux saints associés
à la vie du Bouddha. Ils visitent des
localités telles que Kushinagar,
Siddharthanagar et Lumbini qui sont devenues des
lieux saints, car un homme a répandu un
message de paix à partir de ces
endroits.
Vous pouvez connaître la paix dans le monde
par votre propre éveil. Cette illumination
même est un message. Quand vous rentrerez
dans vos pays respectifs vous pourrez parler ou
demeurer silencieux. Cela marchera, vous verrez.
Quand vos amis vous demandent : "Qu'est-il
arrivé ?" vous pouvez demeurer silencieux.
Il vous le demanderont à nouveau. Restez
simplement tranquille, c'est tout ce que vous avez
à faire.
David : Papaji, beaucoup de gens vous ont
entendu dire : "Je n'ai délivré mes
enseignements ultimes à personne." Quels
sont ces derniers enseignements et pourquoi ne les
répandez-vous pas ?
Papaji : Ils n'en sont pas dignes. Personne
n'est digne de les recevoir. Car mon
expérience m'a révélé
l'arrogance et l'égoïsme de tout le
monde. Cela a conduit à de la souffrance.
Beaucoup de gens souffrent. Je fais actuellement un
nouvel essai. Je verrai ce qui va se passer.
Je ne pense pas que quiconque soit digne de les
recevoir. Vous devez faire preuve de
sainteté pour en être digne. Pourquoi
devriez-vous inquiéter les gens au lieu de
les aider ? C'est de l'arrogance, voyez-vous.
Si un roi envoie un messager dans un autre pays,
son unique tâche est de transmettre le
message. J'ai envoyé un messager en
Occident, mais il a essayé de devenir un
roi. Beaucoup de gens en ont été
perturbés, je l'ai vu de nombreuses fois.
Que faire ? Cette sorte de comportement
relève de l'indignité.
Il se peut que je sois trop généreux
et que je ne lise pas les gens correctement.
Peut-être est-ce de ma faute parce que je
pense que tout le monde est bon. Bien que je parle
de la Vérité à tout le monde,
elle rejette ceux qui n'en sont pas dignes. Seule
une personne sainte peut recevoir cet enseignement.
Une telle personne en sera digne.
Dans le cas contraire, la Vérité
pénétrera la tête et deviendra
un savoir intellectuel. Les Occidentaux veulent une
compréhension intellectuelle. Il sont
très heureux quand ils comprennent. C'est
tout ce que l'Occident veut : un savoir par
l'intellect. Tout le monde sait qu'il y a quelque
chose au-delà'. Mais quand j'en parle,
les Occidentaux disent : "Je ne comprends pas, je
ne comprends pas." Donc je leur dis : "Vous n'avez
pas du tout besoin de comprendre."
J'avais un ami qui habitait à Paris. Il
avait suivi J. Krishnamurti pendant trente-cinq
ans. Il voyageait de part le monde, suivant
Krishnamurti partout où il se rendait : en
Australie, en Nouvelle Zélande, en Suisse,
en Angleterre. Il avait étudié tous
ses livres.
Il vint me voir à Saanen et je lui ai
parlé pendant un certain temps. Après
m'avoir écouté, il dit : "Je ne
comprends pas, je ne comprends pas."
Je lui dis : "Vous n'avez pas à comprendre
ceci. Ce n'est pas quelque chose à
comprendre. Vous devez l'être."
Il désapprouva : "Non, non. Je dois
comprendre. Je ne vous comprends pas et je ne
comprends pas Krishnamurti non plus."
Je lui répondis : "Vous n'avez besoin de
comprendre Krishnamurti ou moi-même."
Il m'expliqua alors pourquoi il avait tant de
problèmes avec Krishnamurti : "Je suis au
point A et Krishnamurti est au point B. Mais quand
je change de perspective de A à B, il se
déplace au point C. Donc, je ne comprends
même pas Krishnaji."
Krishnamurti était également à
Saanen à cette époque et de
nombreuses personnes qui le suivaient venaient me
voir. Un homme vint un jour et se mit à
parler : "Poonjaji et Krishnaji disent la
même chose. Krishnaji dit, "enlevez les
concepts du mental " et Poonjaji dit la même
chose. Ils disent tous deux, "à moins que
vous ne vidiez la coupe du mental, vous ne pouvez
vous éveiller.""
Un disciple de Krishnamurti contesta cette
affirmation : "Non, non, il existe une grande
différence entre les enseignements de
Poonjaji et de Krishnamurti. Krishnaji nous
enseigne comment vider la coupe, Poonjaji nous
enseigne de briser la coupe."
Voilà la différence et elle ne peut
être comprise par le mental. Vous pouvez
comprendre lorsque la coupe est pleine ou lorsque
la coupe est vide, mais si la coupe n'existe pas,
qui êtes-vous et qu'allez-vous comprendre ?
Donc, ce que je dis c'est : "Le mental
lui-même n'existe pas, vous n'avez donc pas
besoin de comprendre." Vous devez le voir et le
sentir quand je parle. Penser ne vous aidera
pas.
Le mental lui-même n'est qu'une idée.
Débarrassez-vous de cette idée. Et le
mental est le passé, donc
débarrassez-vous du passé
également. Venez au présent et je
vous dirai alors que faire ensuite. Venez au moins
au présent et vous verrez.
David : Papaji, beaucoup de personnes
viennent au satsang et ont des expériences
d'éveil. Certaines d'entre elles reviennent
des semaines ou des mois plus tard et disent : "Je
l'ai perdue." Que se passe-t-il là ?
Papaji : De nouveau, c'est qu'ils n'en sont
pas dignes.
David : La plupart du temps vous leur
reprochez cette perte. Vous leur dites : "C'est de
votre faute."
Papaji : Oui, Oui. Ils l'ont perdue parce
qu'ils n'en ont pas pris grand soin. Je dis
à ces gens : "Imaginez que je vous donne un
gros diamant, vous pouvez en vivre pour le restant
de vos jours, vous pouvez le vendre et en obtenir
des millions de dollars. Si, au lieu de cela, vous
ne reconnaissez pas sa valeur et vous vous en
débarrassez, à qui la faute ? Si vous
le donnez à la femme d'un pêcheur qui
l'utilise pour calibrer ses poids parce qu'elle
n'en connaît pas la valeur, à qui la
faute ?"
Cet éveil est un diamant. Il ne devrait pas
être transmis à des personnes indignes
qui en feront un mauvais usage. Et en fait, elles
en abusent. Je ne fais pas de distinction entre les
gens qui viennent me voir. À tous, je leur
dis la même Vérité. Certains
l'obtiennent et puis la jettent en en faisant
mauvais usage.
Ils reviennent et disent des choses du genre : "Mon
amie m'a quitté. Je lui ai
téléphoné et elle est revenue.
Maintenant je suis à nouveau heureux."
Est-ce cela la liberté ? La prochaine fois
ils me diront : "Je suis revenu chez moi, mais elle
m'a de nouveau quitté. À
présent, je suis de nouveau affligé."
J'entends des histoires similaires tous les
jours.
David : Papaji, quand les personnes vous
quittent, vous ne leur dites jamais : "Prenez soin
de ce diamant que je vous ai donné.
Prenez-en bien soin." Simplement, vous leur faites
le reproche de l'avoir perdu lorsqu'elles
reviennent.
Papaji : Toutes ne le perdent pas. Certaines
d'entre elles sont des personnes de toute
beauté. Elles m'écrivent et me disent
: "Je le garde. Je garde encore ce don
précieux. Non seulement je le garde, mais je
le partage avec les autres. Après ce partage
il est toujours le même, il ne diminue pas.
Quel cadeau inestimable vous m'avez fait !" Toutes
ne le perdent pas. Quoique je veuille que tout le
monde en bénéficie, je sais aussi que
tous ne peuvent pas l'obtenir. Néanmoins,
les résultats sont très bons.
J'observe les autres ashrams et je vois ce qui s'y
passe. Comparés à eux, les
résultats que nous obtenons ici sont tout
à fait satisfaisants. Je suis très
satisfait.
David : Une dernière question,
Papaji. Toute votre vie, vous avez essayé
d'exprimer votre propre vécu
intérieur. Pourriez-vous, je vous prie,
faire une nouvelle tentative pour nous ? Qui
êtes-vous ? Qu'êtes-vous ? Quel
vécu avez vous de votre Soi ?
Papaji : Voici une réponse
très facile : "Je suis votre propre Soi. Je
suis votre propre Soi, et c'est la
Vérité. Comment serait-il possible
que je fusse seulement moi-même ? Je suis
votre propre Soi et le Soi de tous les êtres
qui existent et qui viendront à
l'existence."
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